Conférence de Claude Oppikofer sur un événement insolite et peu connu dans la région, la « Glionite » de 1945. Claude s’est intéressé à cette épidémie de fièvre typhoïde par curiosité et voici le résultat de son enquête basée principalement sur un rapport du collège d’experts de l’époque.
Cette fièvre typhoïde, ou « typhus abdominal », une entérobactérie de type salmonelle, cause deux cent mille décès par année et se propage par contamination alimentaire, par selles d’une personne infectée, principalement par l’eau. Elle est en nette régression en Europe depuis 1910 date du début de la javellisation de l’eau. L’effet clinique est le suivant : une incubation de huit à quinze jours se traduisant par une diarrhée transitoire, suivie d’une septicémie agrémentée d’une forte fièvre, de stupeur, torpeur, hémorragie, etc. La létalité est de 30% sans traitement et l’antibiotique fut découvert en 1947, un peu plus tard que la période qui nous concerne.
Que s’est-il passé lors de l’été 1945 à Glion ? L’origine de l’épidémie de Glion se trouve comme souvent dans l’eau. Ce fait a été prouvé par l’histoire de cet écolier en course d’école ayant bu à la fontaine de Glion le 13 juin, le seul de sa classe, est qui fut contaminé par la typhoïde le 27 du même mois. De fil en aiguille, l’origine de cette eau de fontaine fut découverte dans les sources des Avants, qui alimentaient la partie Nord du village. Ces sources se trouvaient à proximité des égouts du Grand Hôtel des Avants, égouts qui se sont avérés avoir une fuite à cet endroit là et qui par conséquent polluaient la source. Il est intéressant de savoir que cet hôtel avait été réquisitionné pour recueillir des réfugiés des camps de Theresienstadt et Belsenbergen. Le porteur même du germe n’a cependant jamais été retrouvé.
Ce qui est surprenant c’est que le service sanitaire du canton savait depuis 1935 que la situation était critique aux niveaux de ces égouts et que la diarrhée revenait tous les étés au moment où on utilisait l’eau de la source, mais personne ne s’est soucié de savoir si le nécessaire avait été entrepris pour régler le problème. Peut-on l’expliquer par le fait que Glion était une partie de la commune des Planches alors que les Avants du Châtelard et donc à des problèmes de communication ? Peut-être. Est-ce dû à des malentendus ? Par exemple, suite aux maux de ventre et à la suspicion de la qualité de l’eau, l’hôtel la fait tester par le service cantonal. L’eau se révèle bien potable mais la bactériologie n’est pas faite ! Est-ce dû au fait que les diarrhées étant habituelles car revenant régulièrement tous les étés, le corps médical ne dénonçait pas les cas suspects. C’est possible.
En conclusion, il en ressort que cette épidémie est le résultat de problèmes de structure, de dialogue, de communication, de compétences, d’inefficacité de la législation et de l’organisation des contrôles, de diagnostiques tardifs, de suspicions non annoncées et finalement, de négligence de l’administration de Glion de prendre des mesures rapide, comme la chloration. Cette mesure fut prise le 7 juillet et la situation fut sous contrôle, aucun nouveau cas ne s’étant présenté après le délai maximum d’incubation.
Pour finir cette conférence, nous avons la chance de recevoir le témoignage d’Edgard Styger, né le 8 août 1936 et victime de la « Glionite » alors qu’il avait huit ans et qu’il habitait la ruelle de la Fontaine. Il nous décrit le contexte de l’époque, où il faisait bon vivre et où une diarrhée ne causait pas trop de soucis et nous raconte ensuite son expérience quasi mystique de sa maladie et de sa récupération presque miraculeuse.