Soirée interclubs : Repas-conférence avec le Père Guy Gilbert, "Père des Loubards"

jueves, 19 de marzo de 2015 19:00-23:00, Astra Hotel, Vevey
Organizador(es):
  • Emmanuel du Marchie

Le jeudi soir 19 mars 2015 s’est déroulée la soirée interclubs à l’Astra Hôtel de Vevey qui a été fréquentée par une petite cinquantaine de personnes, avec au programme :
- un succulent repas servi par la brigade de cuisine de l’Hôtel Astra, sous la direction des frères Ming
- suivi d’une conférence-débat en présence du Père Guy Gilbert, surnommé le curé des loubards, qui a rejoint Vevey depuis Paris, suite à l’invitation de notre président Fabrice Ducrot.
La conférence-débat a commencé dès la fin du repas et s’est déroulée en trois phases :
- la conférence du Père Guy Gilbert sur le thème « Moment de vérité, à partager sans modération »
- la présentation d’un film consacré essentiellement à la Bergerie du Faucon, destinée à la réinsertion de
jeunes en grande difficulté et en rupture avec leur famille et la société
- un débat, parfois nourri et enflammé, avec l’assistance.

Conférence
La conférence du père Guy Gilbert a consisté pour l’essentiel à la présentation de son parcours de vie, depuis sa naissance, le 12.9.1935 à Rochefort-sur-Mer, à côté de La Rochelle, jusqu’à aujourd’hui. Il s’est présenté devant son public, assis sur une chaise posée sur une table, avec son traditionnel blouson en cuir noir bardé de pin’s et de badges et son franc-parler habituel.
Guy Gilbert est issu d’une famille ouvrière de 15 enfants (8 filles et 7 garçons) dont 4 sont décédés aujourd’hui.
Sa mère, fille unique, était d’une bonté infinie donnant beaucoup d’amour à sa nombreuse progéniture, tandis que son père faisait preuve d’une grande sévérité, éduquant ses enfants dans une stricte discipline.
Sa vocation se déclare très tôt et à l’âge de treize ans, en 1948, il entre au petit séminaire pour être prêtre. Mais ce n'est qu'en Algérie, où il part en 1957 comme séminariste pour accomplir son service militaire, que sa vocation s'éveille réellement.
C'est à Alger qu'il finit son séminaire. Il est ordonné prêtre en 1965 et nommé vicaire à Blida. De sa vie en Algérie il retiendra « qu’il peut y avoir des guerres justes, mais que toutes les guerres sont sales ».
Pour être proche de la population, il apprend l’arabe, comme plus tard à Paris où il parlera l’argot des loubards. Il quittera l’Algérie en 1970 pour rejoindre Paris avec un enfant de douze ans qui s’était réfugié chez lui, incapable de parler pendant un an - ses parents le faisaient manger dans l’assiette du chien, après le chien – et oriente une seconde fois sa vie : les gosses de la rue ont besoin de quelqu’un, c’est à eux qu’il ira. D’où sa seconde vocation : celle d’éducateur spécialisé de rue.
De retour à Paris, il s’installe dans le 19ème arrondissement, dans le quartier de La Villette, et aide les
adolescents livrés à eux-mêmes, les jeunes drogués et les délinquants récidivistes.
En 1974, grâce à un legs, Guy Gilbert achète, à la demande des jeunes qui en avaient marre du béton et des bars, une ferme à La Palud-sur-Verdon, « une ruine loin de Paris », pour y installer un lieu d'accueil, la « Bergerie du Faucon » où, avec une équipe d'éducateurs, il tente de réinsérer des jeunes en difficulté, par le travail et le lien avec les animaux.
Les buts de l’association sont les suivants :
- héberger, réinsérer, former, orienter et suivre à long terme des jeunes en difficultés ou en délinquance
- recréer un cadre familial par la présence permanente des éducateurs-compagnons
- pratiquer une pédagogie qui s’appuie sur l’outil animal dans la Bergerie du Faucon à caractère social et
pédagogique
- proposer des cours et stages adaptés
- aider des jeunes en prison ou abandonnés
- organiser conférences et débats animés par Guy Gilbert.
Cette année, il fête ses 50 ans de sacerdoce et 41 ans de Bergerie du Faucon.

Présentation d’un film
Le film présenté parle essentiellement de la création de la Bergerie du Faucon et de son fonctionnement. La reconstruction de la ruine, en partie avec l’aide de jeunes, a pris dix ans et est devenue une superbe bâtisse provençale.

2 RÉSUMÉ DE NOS ACTIVITÉS
Ce lieu de vie a pour but principal l’accès à l’autonomie pour des jeunes marginalisés, multirécidivistes, déstabilisés, agressifs, paumés.
Plus précisément, il s’agit de :
L'accueil, l'hébergement et le suivi psychopédagogique de jeunes mineurs marginalisés en vue de leur réinsertion. Les méthodes socio-éducatives utilisées sont basées, notamment, sur une approche de l’animal, et développées dans une communauté dénommée " lieu de vie ". Un lieu où l’usager se retrouve au sein d’un petit groupe, offrant un cadre sécurisant, où les relations affectueuses occupent une place importante.
Le but de ce placement est le même que dans celui des institutions à caractère social. Sa caractéristique réside dans le fait que le projet pédagogique fait en grande partie référence aux modèles familiaux et prévoit un éducateur pour un jeune, qui doit respecter des règles strictes.
Le jeune en difficulté est « poussé » à vivre une autre réalité face aux situations complexes qu’il a vécues ou qu’il doit encore vivre. Enfin, l’institution utilise un outil pédagogique privilégié qui facilite et accélère la socialisation des jeunes placés : le travail en lien avec les animaux. En effet, à leur arrivée à la Bergerie du Faucon, les jeunes aiment plus les animaux de la ferme que les humains.

 Questions et réponses
La fin de la soirée s’est terminée par un débat intéressant et passionné, qui a abordé des thèmes tels que le mariage des prêtres, la présence de la femme dans l’Eglise, l’Islam et ses dérives, la politique française, la situation économique et sociale, l’éducation, et j’en passe.
Voici un résumé dans un style télégraphique et quelques citations :
Les musulmans ont besoin de retrouver leurs racines et l’histoire de leur pays d’origine. C’est leur premier défi. Leur deuxième défi se situe dans le registre culturel. La pudeur est une valeur centrale dans l’Islam. L’occident ne les y aide pas. Le dévoilement des corps leur donne le sentiment de vivre dans une société impudique.
Mahomet dit dans le Coran : « ce que vous ne pouvez atteindre par la douceur, jamais vous ne l’obtiendrez par la violence ».
L’Evangile vise haut et fort en trois mots : « l’amour vainc tout ».
En achetant une ruine dans les gorges du Verdon que 250 jeunes loubards de plusieurs religions ont reconstruit, un jeune musulman trouve dans une poubelle une vierge à l’enfant qui est cassée. Il me l’apporte, la répare et me l’offre. La bâtisse terminée, nous l’avons incrustée au-dessus de la porte d’entrée. Elle veille depuis des dizaines d’années sur nos jeunes. Elle est signe d’espérance. Quand nous puisons dans quelque religion à laquelle nous appartenons, ces gestes d’amour nous font espérer que demain notre unité ne sera pas un rêve.
L’Eglise devrait ordonner des hommes mariés, mais des prêtres ne doivent pas pouvoir se marier.
Les jeunes qui arrivent à la bergerie du Faucon viennent d'un rythme que j'ai connu quand je vivais avec eux à Paris : ils se couchent à 4h du matin pour se lever à midi. Je leur dit d'accord, mais demain il faut être debout à 7h30, petit déjeuner à 8h et à 8h30 tu t'occupes des bêtes. Si tu arrives à 8h31, tu es sanctionné. D'un seul coup ils s'aperçoivent qu'avec beaucoup de chaleur humaine, un sens du règlement, de la loi, est tracé. Parce qu'ils n'ont aucune loi. Ils ont fait ce qu'ils ont voulu, c'est un peuple très difficile, et de plus en plus difficile. Mais l'un d'entre eux m'a dit, un jeune de quatorze ans, qu'il avait voulu changer de Centre parce qu'il voulait quelque chose de « plus serré ». Il trouvait que là où il était avant on pouvait faire n'importe quoi. Les jeunes ressentent au fond d'eux-mêmes qu'ils ont besoin qu'on leur dise non. On ne leur a jamais dit non, donc tous les débordements sont possibles. Quand un jeune n'a pas eu de frein, les débordements sont immenses. Il n'y a qu'à lire les journaux.
Moins j’ai de besoins personnels, plus je peux m’occuper des besoins des autres. S’appauvrir, c’est s’enrichir au service des autres. Si nous sommes encombrés par nos biens, nous ne pouvons plus nous préoccuper d’autrui. S’il est un choix que les parents ne pèsent pas assez, c’est bien celui de l’évolution de leur carrière par rapport aux conséquences sur leurs enfants. Ce n’est pas en gagnant plus d’argent que l’on devient heureux.
La famille est la cellule de base de la communauté humaine, le premier lieu où chaque être apprend la confiance en soi et la confiance en autrui. Elle permet en effet à chacun de découvrir qu’il a sa place dans une histoire, dans un réseau, dans le respect de son âge, de son sexe, de ses qualités ou de ses faiblesses. La formidable cohérence des chrétiens part de la cellule la plus petite, la plus naturelle, la plus ancienne, la plus profonde : la famille. Issus de la paix qui règne dans une famille, les cercles concentriques de l’amour se multiplient. La paix du monde naît de là. Et de nulle part ailleurs.
*****
A l’issue de la soirée, les participants ont eu l’occasion d’acheter quelques livres, dédicacés par le Père Guy Gilbert et un don de CHF 1'500.00 lui a été remis.
Bonne semaine à tous.

Le Bulletinier : Gilles Altermath


Registro

Ha pasado el plazo de registro